Margrete Schwenk

Schwenk, Margarete 22.09.1921 — 01.03.1945 Ulm Sekretärin

23 ans.

Elle avait à peine 23 ans…

Elle vivait à Tettnang, à quelques kilomètres du lac de Constance.

Mince, et élancée, 

Margrete était (aussi et surtout) très cultivée. 

Secrétaire de direction, elle parlait un anglais parfait, le français, l’italien, et s’intéressait beaucoup à la culture anglaise et américaine.  

Tous les dimanches, ses parents invitaient des prisonniers français à manger chez eux pour qu’elle puisse pratiquer la langue. Elle était leur fille unique.

Malheureusement, ce n’était pas la bonne époque. 

La guerre faisait rage, elle habitait en Allemagne, et les Anglais, comme les Américains, bombardaient toute la région de façon répétitive, en nocturne.

Elle était en dehors de la guerre. Tout cela la dépassait. Déconnectee de la politique, c’était surtout la soif d’entrer dans la vie et de côtoyer des cultures différentes,  qui était sa préoccupation majeure.

 Elle était la cousine directe de ma grande-tante Louise Daur,  qui était aussi la belle-sœur de mon grand-père. 

Celui-ci, Otto,  rentrait assez souvent de France pour retrouver ma mère qu’il avait placée dans sa famille, chez Louise.

Otto Daur et Margrete.
Margrete Schwenk avec Otto Daur et Luise Daur.1943.

A 39 ans, mon grand-père Otto était dans la force de l’âge, plutôt séduisant, et surtout célibataire.  Sur les petits bouts de film tournés à l’époque, dans ses regards, on s’aperçoit que Margaret n’était pas insensible à son charme.  Elle avait déjà eu une brève relation avec un homme d’origine italienne qu’elle avait rencontré auparavant. La guerre les avait séparés. Lui aussi, était beaucoup plus âgé qu’elle. Mais il semble qu’elle était attirée par les hommes d’un âge plus prononcé.

Otto, mon grand père, photographe et cinéaste amateur, avec un très bon matériel de marque Leica. Toute la famille profitait de ses images lors de ces visites de quelques jours.

Margrete  était omniprésente  dans les images filmées ou fixes.  Je pense que mon grand-père n’était pas non plus insensible à son charme. Mais la guerre était là.

 Quelques jours après ces quelques images, le 1er mars 1945,  l’aviation anglaise bombarda La Ville d’Ulm, à nouveau..

Cette ville , dans le Land allemand de Bade-Wurtemberg , a été lourdement bombardée pendant les derniers mois de la Seconde Guerre mondiale . Le premier et le plus lourd raid, le 17 décembre 1944, fit 707 morts, 613 blessés et 25 000 sans-abri. Ma mère, qui vivait chez Tante Louise à Tettnang, à 100 km d’Ulm,  me racontait  qu’ils ressentaient les secousses à 100 km, et surtout, en regardant par la lucarne situé sur le toit, le ciel était rouge au-dessus de la ville d’Ulm, au bout de la nuit. 

Margrete avait survécu à ce bombardement.  Nous possédons encore dans la famille des pièces de monnaie anciennes qu’elle avait retirées des décombres, et qui étaient souillées par le phosphore des bombes que les Américains avaient larguées.

Une flotte encore plus importante que celle du 17 décembre 1944 bombarda Ulm le 1er mars 1945, tuant 479 personnes. Cette nuit-là, alors qu’on n’était plus qu’à 2 mois de l’armistice,  les avions anglais pilonnèrent la ville avec une très grande violence.  Une bombe perforante détruisit l’abri  dans lequel Margarete s’était réfugiée.

Elle mourut aussitôt.

Ses parents habitaient dans le petit village de klingenstein situé à quelques kilomètres de la ville. Ils apprirent la nouvelle le lendemain du bombardement.

 Le père partit pour la ville, pour retrouver le corps de sa fille. Elle était leur unique enfant. 

Ils avaient attendu 12 ans avant qu’elle enrichisse leur vie. Une bombe anonyme avait tout emporté en une fraction de seconde.

Après avoir déblayé les décombres pendant des heures, il retrouva le corps de son enfant.

Il avait pris une brouette avec lui.

Il y déposa le corps de sa fille, puis il la transporta ainsi le long des 8 kilomètres qui le séparaient de klingenstein. 

Il put ainsi lui donner une sépulture, faire son deuil. Puis les années passèrent, la paix revint…

Grâce à mon grand-père, il reste de Margaret, aujourd’hui, quelques photos et des bouts de film dans lesquels on la voit sourire et s’ouvrir à la vie avec appétit.

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